La sonde russe Luna-25 s’est écrasée sur la surface de la Lune, annonce lundi 21 août l’agence Rocosmos. L’appareil était censé alunir en toute sécurité et démontrer les avancées des Russes en termes d’atterrissage de précision. L’accident aurait été causé par un défaut lors de l’allumage moteur.
Coup dur pour le programme spatial russe. Alors que le calendrier exigé par Vladimir Poutine est déjà ambitieux, la sonde Luna-25, censée explorer la surface de la Lune, s’est écrasée sur le satellite samedi dernier. Son alunissage était prévu sur le pôle Sud lunaire. Jusqu’ici, les engins se posaient dans la zone équatoriale. Mais après deux jours de tentatives de communication vaines, le satellite a été officiellement déclaré détruit.
« Le vaisseau spatial s’est déplacé vers une orbite non calculée et a cessé d’exister à la suite d’une collision avec la surface de la Lune. » – Roscosmos.
La mission de Luna-25 était prévue initialement pour durer un an. La sonde devait prélever et analyser des échantillons du sol. Mais l’objectif de ce lancement était aussi de démontrer les avancées technologiques permettant un atterrissage précis lors de futures missions. La mission Luna-25 s’avère donc un échec cuisant.
L’accident serait probablement dû à un défaut lors de l’allumage du moteur au moment de l’alunissage. Une commission interministérielle sera chargée d’étudier la raison de l’accident de la sonde Luna-25 dans les prochaines semaines.
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— franceinfo (@franceinfo) August 20, 2023
La Lune : terrain d’atterrissage complexe
Cet accident met un coup aux ambitions spatiales russes. Avec cette mission Luna-25, le Kremlin espérait remettre les pieds sur la Lune, près de 50 ans après sa dernière mission lunaire. Un projet qui, dès son élaboration, semblait compliqué pour le patron de Roscosmos, Iouri Borissov. « La probabilité de réussite de telles missions est estimée à environ 70 % », annonçait-il à Vladimir Poutine en juin dernier.
La Lune est un environnement d’atterrissage compliqué pour deux principales raisons : son atmosphère et… la Lune.
« Sur la Lune, pour atterrir, on n’a pas le choix, expliquait à Numerama Stéphanie Lizy-Destrez, enseignante chercheure à l’ISAE-SUPAERO en conception des systèmes spatiaux. L’atmosphère, très fine, n’est pas suffisante pour ralentir. Il faut être en orbite autour de la Lune pour pouvoir se poser, mais les vaisseaux vont encore trop vite : il faut les ralentir. La gravité lunaire étant plus faible que celle de la Terre, il faut ralentir d’autant plus fort. »
À ce problème d’atmosphère s’ajoute un problème d’énergie. En effet, la Lune bouche en partie l’accès des engins spatiaux aux radiations du Soleil. Il faut donc des batteries d’une très grande capacité pour réussir à gérer l’énergie le temps de l’atterrissage. Le blocage du Soleil ajoute aussi une problématique de visibilité, accentuée par le régolithe, la poussière de Lune.
« Sur la Lune, en plus, il y a de la poussière. Le régolithe [la poussière fine en surface] peut se soulever pendant la dernière phase et occulter les caméras. »
Enfin, la topologie de la Lune, parsemée de cratères, ajoute des risques de chute au moment de l’atterrissage. Il faut donc savoir exactement où alunir, et réussir sa manœuvre à quelques mètres près.
Coup d’arrêt dans la course à la Lune
Luna-25 était d’autant plus compliquée que la Russie se trouve dans une situation géopolitique complexe. Avec la guerre en Ukraine, les partenaires européens et internationaux se sont retirés.
Après le début de l’invasion en Ukraine en février 2022 par Vladimir Poutine, l’Agence spatiale européenne (ESA) avait renoncé à travailler avec Moscou sur le lancement de Luna-25 et sur les futures missions 26 et 27. Les Russes ont donc dû remplacer certaines parties de la sonde par des productions de leur cru.
Ces dernières années, une nouvelle course spatiale a vu le jour entre la Russie, les Etats-Unis (avec leur mission Artemis), la Chine, la Corée du Sud et l’Inde. Cette dernière semble la mieux placée pour remporter la course à la Lune suite à l’échec de Luna-25.
La mission indienne Chandrayaan-3, de l’ISRO (agence spatiale indienne), est en effet toujours en cours. La sonde fut lancée le 14 juillet dernier. Son itinéraire est moins direct que celui emprunté par Luna-25. Elle devrait alunir le 23 août 2023.